Facture du Kerala |
La facture du Kerala, principalement circonscrite à la ville de Trivandrum et dans une moindre mesure à Changanacheri, était très vivante jusqu'en 1973 mais a presque totalement disparu aujourd'hui. Les vinas faites à Tanjore ont de nos jours remplacé celles du Kerala chez tous les revendeurs de l'état, et un nombre croissant de musiciens jouent sur des instruments de cette origine. La facture du Kerala ne fait donc plus partie aujourd'hui que du passé, n'existant que par les très nombreux instruments lui ayant survécu. |
Les bois |
Le jaquier est le bois principalement utilisé dans la facture des vinas de Trivandrum, aussi bien pour la confection de la caisse que pour celle du chevillier ou de la table d'harmonie. Il provient des collines de la région, assez largement arrosées, et sa qualité est ainsi sans doute légèrement inférieure à celle des arbres venant des plaines plus sèches du Tamil Nadu. Très exceptionnellement des corps de vinas anciennes ont été réalisées en teck ou même en palissandre des Indes. Cette dernière essence a très souvent servie à la facture de la table et du chevillier pour les plus beaux instruments du XIXème et de la première moitié du XXème siècle. L'usage du jaquier est exclusif sur toutes les vinas postérieures à 1950. |
La structure |
Nous avons relevé sur les multiples instruments fabriqués à Trivandrum, par la Sarasvati Veena Factory ou par des luthiers isolés antérieurs à cette fabrique, des structures de type 1, 1 +, 2 A, 2 A+, 3 et 3 +. Les vinas avec un yali solidaire du chevillier (1 +, 2 A + et 3 +) sont les plus anciennes (antérieures à 1950), les plus fidèles au style traditionnel du Kerala, et les plus superbement sculptées. Celles présentant un yali façonné séparément sont les plus récentes, assez inspirées de la facture de Tanjore. Fait beaucoup plus rare, les structures de la partie supérieure (table et dandipalakka) sont elles aussi très diversifiées : ces deux pièces sont parfois séparées, parfois façonnées dans une seule pièce de bois. Un cas intermédiaire (table remontant jusqu'à mi-manche) a même été observé. Dans ce cas encore les formes les plus sont originales sont surtout rencontrées sur les instruments du début du siècle, n'ayant pas encore subi l'influence de la facture de Tanjore. |
Le corps |
Les instruments de Trivandrum sont de petite taille, ayant une longueur totale généralement comprise entre 122 et 130 cm et une longueur de corde vibrante allant de 78 à 81 cm. |
La décoration de la caisse est principalement sculptée sur les instruments antérieurs à 1940. Les deux portions de cercle, autour du cordier et à la base du manche peuvent être ornées de motifs géométriques ou floraux, ou de frises représentant des dieux ou des animaux (éléphants, cerfs...). Un bandeau finement ouvragé entoure la partie supérieure de la caisse, à la limite de la table d'harmonie. Un bracelet sculpté, parfois en forme de chaînette ou de torsade, marque le départ du manche. Le bord de celui-ci peut être laissé libre de tout ornement, ou être revêtu d'un plaquage décoratif en corne de cerf, rappelant la facture de Tanjore. Les chevilliers des instruments anciens présentent parfois une ouverture du fond, à la hauteur des chevilles, facilitant le montage des cordes. Ils sont souvent magnifiquement sculptés et sont solidaires du yali qui peut prendre des aspects très différents suivant les facteurs, rappelant parfois le dragon aux formes élancées de Tanjore mais pouvant aussi revêtir l'aspect plus massif d'une sorte de lion comme sur les instruments de Mysore. Mis à part le dessin de leurs côtes, les vinas de Trivandrum les plus récentes (de 1950 à 1973) ressemblent beaucoup plus à des instruments de Tanjore. Elles sont généralement de taille plus importante. La décoration est faite de plaques de corne de cerf gravées et le yali, séparé du chevillier, a une forme de dragon à la langue retroussée. Il garde toujours un profil assez fin mais ne montre plus le cisèlement des modèles antérieurs. |
Yali ancien du Kerala à tête de dragon |
Yali ancien du Kerala à tête de lion |
Yali de la Saraswati Veena Factory, époque tardive |
La table et le dandipalakka |
Les tables des vinas anciennes sont assez plates, peu épaisses, et ont un rayon compris entre 16 et 17,5 cm. Les plus récentes ont un profil et un rayon plus conforme à la tradition de Tanjore. Elles sont collées et vissées sur le bord de la caisse à raison d'une vis tous les 10 cm environ. Différentes formes d'ouïes peuvent être observées : de petits trous disposés en cercles autour des rosaces, ou un ou plusieurs orifices de 5 à 8 mm de diamètre pratiqués sur la table, sous le chevalet ou même sur la couverture du manche lorsque ces deux parties sont réunies en une seule pièce. Aucune ouverture de grande dimension n'est jamais percée sur ces instruments. |
Le chevalet |
Les chevalets des vinas de Trivandrum, possèdent deux particularités très originales les distinguant entre tous. La première est de ne pas utiliser comme support des cordes de talas la traditionnelle pièce de bronze courbe reposant sur la table, mais d'employer à cette fin une tige d'acier pliée en une sorte de "U" horizontal, encastrée dans le pied du chevalet, rendant ainsi beaucoup moins directe la transmission de la vibration des cordes. |
Le cordier |
Le cordier prend à Trivandrum la forme d'une grande plaque d'acier en demi-cercle, fixée sur l'arrière de la caisse par des vis ou des clous. Il est percé de trous sur sa partie supérieure pour permettre le passage des langars, et est surmonté d'une fine tige métallique servant de renfort. |